Transfert de fonds à l’étranger comme acte de blanchiment : les circonstances de l’espèce sont déterminantes
A l’occasion d’un arrêt rendu le 4 juillet 2019, le Tribunal fédéral a eu l’occasion de confirmer et d’expliciter encore sa jurisprudence publiée aux ATF 144 IV 172, dans laquelle il avait considéré qu’un transfert international de valeurs patrimoniales ne constituait pas nécessairement un acte d’entrave propre à réaliser un blanchiment d’argent aux termes de l’art. 305bis CP. Le Tribunal fédéral souligne que ce sont bien les circonstances de l’espèce qui permettent de retenir ou non l’existence d’un acte d’entrave à la confiscation et non le simple fait d’être en présence d’un transfert.
Dans l’espèce soumise au Tribunal fédéral, le recourant, se référant à cet ATF 144 IV 172, contestait en particulier que le transfert des fonds litigieux sur son compte en Suisse ait entravé leur identification, leur découverte ou leur confiscation ; il soutenait par conséquent que ce transfert n’était pas constitutif d’un acte de blanchiment.
Le Tribunal fédéral a rejeté le grief, rappelant que dans son ATF 144 IV 172, il avait considéré que la question de savoir si un comportement était propre à entraver la confiscation de valeurs patrimoniales obtenues par la commission d’un crime devait être examinée au regard du cas d’espèce et qu’il pouvait y avoir blanchiment d’argent du fait d’un transfert international de valeurs patrimoniales si la transaction était propre à entraver la confiscation à l’étranger (c. 7.2.2).
Or, en l’occurrence, le recourant avait transféré les montants litigieux, en un unique versement, sur un compte joint en Suisse servant à l’épargne de son couple. Ce transfert lui avait permis d’affirmer que la somme en question constituait de l’épargne lui appartenant ainsi qu’à son épouse, tout en contestant son origine illicite. Peu importait que le transfert n’eût pas, en l’espèce, produit de résultat pratique, puisqu’il était propre à entraver l’identification, la découverte ou la confiscation des valeurs concernées, en faisant apparaître celles-ci comme l’épargne du couple du recourant sans lien avec ses activités litigieuses conduites à l’étranger.
Proposition de citation : Alain Macaluso, Transfert de fonds à l’étranger comme acte de blanchiment : les circonstances de l’espèce sont déterminantest in www.droitpenaldesaffaires.ch, du 6 août 2019.